« Jimmy Vicaut a-t-il connu le Flow (ou état de grâce) ? »

Deuxième du 100m derrière Asafa Powell le 4/07 au Stade de France, Jimmy Vicaut a signé le nouveau record de France sur la distance.

Photo Jimmy Vicaut L'équipe

A la lecture de l’interview parue sur l’équipe.fr du soir même*, j’émets l’hypothèse que Jimmy Vicaut, nouveau détenteur du record de France et d’Europe du 100m, a vécu un moment de « Flow » (ou état de grâce) ce samedi 4 juillet 2015 (jour de la Saint Flo-rent 😉 ).

Définition (wikipedia) du « Flow »

« Le Flow, littéralement le flux en anglais, est l’état mental atteint par une personne lorsqu’elle est complètement immergée dans ce qu’elle fait, dans un état maximal de concentration. Cette personne éprouve alors un sentiment d’engagement total et de réussite. Ce concept, élaboré par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi, a été repris dans des domaines variés et nombreux, du sport à la spiritualité en passant par l’éducation et la séduction »

Analyse de l’interview de Jimmy Vicaut au filtre du « Flow »

Voici des extraits de son interview qui me font penser qu’il a connu cet état de grâce, même si la réunion de tous ces phénomènes n’est pas nécessaire pour conduire au Flow.

Les 3 premiers critères décrivent des caractéristiques de l’activité propices au Flow :

  • Objectifs clairs

« J’ai toujours eu le record (de France) dans un coin de ma tête. »

  •  Équilibre entre la difficulté de l’activité et les compétences de l’acteur (l’activité n’est ni trop facile ni trop difficile, elle constitue un défi motivant)

« J’étais motivé à l’idée de courir à côté d’Asafa. »

  • L’activité est en soi source de satisfaction (elle n’est donc pas perçue comme une corvée)

« J’ai été beaucoup blessé dernièrement. L’an passé, aux Championnats d’Europe, je ne cours qu’en séries. Je suis content. Le travail paye vraiment. »

 

Les 5 derniers critères décrivent plutôt l’état de conscience modifié qu’implique le Flow :

  • Haut degré de concentration sur un champ limité de conscience (hyperfocus)

« Après le départ, je le ((Asafa Powell, aucun autre athlète ne l’intéresse…) vois devant moi. »

  • Une perte du sentiment de conscience de soi, disparition de la distance entre le sujet et l’objet

« A l’arrivée, je ne sais pas ce qui se passe… Et là, il y a un vide. Je suis dans un autre monde. »

  • Distorsion de la perception du temps

« J’ai l’impression de voler. », « on me dit:  »tu as fait 9 »86 ». Je réponds  »tu es sûr? » »

  • Rétroaction directe et immédiate. Les réussites et difficultés au cours du processus sont immédiatement repérées et le comportement ajusté en fonction

« Je me dis que je suis en retard puis je reviens vers lui. Et, quand je casse, je suis à côté de lui. »

  • Sensation de contrôle de soi et de l’environnement

« Je suis impatient de recourir avec ces gars-là, car c’est grâce à eux que je vais vite. Il y a quelque chose qui s’est débloqué. Je vais essayer de reproduire la même chose aux Championnats de France. »

 

Apport de la Préparation mentale dans la reconnaissance et la reproduction du Flow

Bien entendu, même si les éléments concordent plutôt bien, l’atteinte du Flow par Jimmy Vicaut ce jour-là n’est qu’une hypothèse. Pour déterminer avec davantage de certitudes cet état de Flow, j’aurais effectué, en tant que préparateur mental, un entretien d’explicitation avec l’athlète. Cet accompagnement aurait également permis au sportif de découvrir d’autres aspects de cet état, de mettre des mots sur ce qu’il avait vécu, et de faire en sorte d’en faciliter la reproduction dans d’autres circonstances. Car ce moment de Flow, moment où le corps et l’esprit ne forment qu’un, peut paraître simple à identifier dans une telle interview. Pourtant, l’athlète le recherche en permanence pour atteindre l’objectif ultime du record, et, une fois qu’il l’a connu, il n’a de cesse que de tenter de le reproduire pour viser toujours plus haut

Exemple avec un nageur :

Un nageur ex-champion de France me confiait récemment avoir déjà goûté cette sensation étrange de ne pas voir ses adversaires alors qu’il sortait la tête, comme d’ordinaire, pour respirer… ou de glisser sans sentir de résistance dans l’eau… jusqu’à ce qu’il prenne conscience de ces sensations et que cet état de grâce disparaisse.

Il cherchait sans le savoir à reproduire cela sur une course entière car il avait intégré qu’à coup sûr cet état de Flow lui permettrait de rejoindre les Jeux Olympiques, à Rio, en 2016.

 

*cf. Article de l’équipe.fr à lire sur http://www.lequipe.fr/Athla-tisme/Actualites/Record-de-france-du-100m-pour-jimmy-vicaut-en-9-81/571848