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J.O. Paris 2024, de la préparation mentale dans les préconisations du rapport Onesta

Paris a obtenu officiellement, le 13 septembre 2017, l’organisation des Jeux Olympiques 2024. Laura Flessel, ministre des sports, a dès le lendemain missionné Claude Onesta, l’ex-manager des Experts en handball, afin de rédiger une « mission d’étude pour la haute performance » contenant les facteurs clés de succès des athlètes français lors de ces olympiades.

Et parmi les préconisations figure la Préparation Mentale des athlètes ! Décryptage…

Objectif 80 médailles !

C’est le nombre de médailles que la ministre fixe à l’équipe de France à l’horizon 2024. C’est ce que l’on appelle en Préparation Mentale un objectif de résultat, c’est-à-dire qu’il dépend du résultat des autres nations et pas seulement des athlètes français.

En observant le graphique ci-contre, on se rend compte que cet objectif est très ambitieux pour la France : au regard des 42 médailles obtenues à Rio en 2016 et également de la moyenne des 38 médailles sur les six derniers Jeux Olympiques d’été (depuis 1996 à Atlanta). Même si la courbe semble croissante depuis le creux de 1960, Claude Onesta prévoit des résultats en stagnation aux jeux d’été 2020 à Tokyo avec 45 médailles, loin de l’objectif affiché des 80 quatre ans plus tard…

Statut d’athlètes « haute performance »

Dans son rapport de 34 pages rendu public mardi 30 janvier, Claude Onesta préconise d’identifier dès cette année les sportifs «médaillables» en 2024 et leur donner les moyens pour réussir. Pour cela, il propose de créer un nouveau statut d’athlètes qu’il nomme «haute performance», qui irait au-delà de la classification actuelle de «haut niveau» du Ministère des Sports. Les athlètes intégrés dans cette liste et leurs entraîneurs pourront alors «bénéficier d’un niveau de revenus minimum décent et d’un statut d’assuré social indispensable pour eux et leur famille».

Claude Onesta précise : «Il faut pouvoir admettre que sur certaines périodes de préparation olympique et paralympique, les « médaillables+ » investissent 100% de leur temps dans leur projet de conquête de podiums». Puis «Certaines fois, le « double projet » sport-étude ou sport-travail ne sera plus réalisé concomitamment mais successivement, et ce pour correspondre aux exigences de disponibilité et de récupération nécessaires au projet de haute performance».

Préparation Mentale et « gains marginaux »

Claude Onesta a également rédigé une partie sur l’aspect mental. Ainsi en page 14 du rapport, un paragraphe s’intitule «La recherche des bénéfices marginaux».

Préparation Mentale, pour améliorer la performance au haut niveau ?

On y lit que les fédérations ne sont pas suffisamment portées sur les «gains marginaux» que représentent la préparation mentale ou l’innovation technologique, et l’Insep (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) pas suffisamment adapté aux sportifs de très haut niveau. Il souligne à quel point cela concourt à améliorer la performance :

«La faiblesse de l’accompagnement médical de la performance, de l’innovation technologique ou de la Préparation Mentale fait défaut à bon nombre de fédérations. Il s’agit là de gains essentiels pour améliorer la performance».

Préparation Mentale en France vs autres nations

Puis compare ce qui se fait à l’étranger et ce qui se fait en France (tout comme l’article sur le rugby français que j’ai rédigé en novembre 2017), et mentionne l’importance de prévoir et anticiper, ce qui est l’essence du travail en Préparation Mentale, travail qui pourrait être intégré au sein des entraînements et des compétitions préparatoires aux J.O. :

«Les sportifs du monde entier travaillent en permanence sur le socle technique de leur discipline mais les marges de progrès sont très tenues. La performance ne peut pas être résumée uniquement par l’optimisation d’une action, d’un geste ou d’un mouvement. Si le sportif doit être en pleine possession de ses moyens physiques, il doit aussi prévoir et anticiper tous les aléas pour éviter l’effet de surprise le jour de la compétition. La prise en compte de tous ces éléments complémentaires définit le périmètre des bénéfices marginaux.»

«La Préparation Mentale, comme le domaine des sciences humaines et sociales, sont insuffisamment explorés par les sportifs français alors que l’on connaît l’ascendant psychologique dont bénéficient des nations qui l’utilisent depuis plusieurs décennies.»

Préparation Mentale, pour du bien-être et de la longévité ?

Jean Fournier définit la Préparation Mentale (cahiers de l’INSEP, N°22, en 1998), comme « une préparation à la compétition par un apprentissage d’habiletés mentales et d’habiletés d’organisation, et dont le but principal est d’optimiser la performance personnelle de l’athlète, tout en promouvant le plaisir de la pratique et en favorisant l’atteinte de l’autonomie ». Claude Onesta reprend et complète en évoquant le bien-être et la longévité de l’athlète au plus haut niveau :

«Cette approche permet une pratique plus épanouie et plus autonome du sport de haut niveau et contribue en ce sens au bien-être de l’athlète et donc à sa longévité.»

Préparation Mentale, quelle offre proposée sur le marché français ?

Il rappelle également qu’identifier un Préparateur Mental compétent n’est à ce jour pas si évident en France. Il est vrai que le titre n’est pas encore protégé au RNCP (Répertoire National des Certifications Professionnelles), que les diplômes et les expériences sont variés sur le marché. Il laisse aux athlètes la possibilité de choisir qui leur convient, tout en proposant une mise en réseau efficace pour leur faciliter les démarches de recherche :

«L’offre est multiple et très riche en matière de préparation mentale, et chaque athlète pourra choisir. Les praticiens compétents dans le champ du sport ne sont pas toujours évidents à identifier et il convient de pouvoir les mettre en réseau afin de proposer rapidement et efficacement des solutions aux sportifs.»

Préparation Mentale, pour développer les habiletés mentales ?

Le TOPS (Test of Performance Strategies) ci-contre, que je réalise avec certains athlètes permet d’identifier les forces et les axes d’améliorations dans les différentes habiletés mentales, que ce soit en entraînement ou en compétition. Claude Onesta en identifie en fin de paragraphe quelques-unes qui sont primordiales selon lui pour avancer sur le chemin de la performance.

«Gestion émotionnelle, concentration, retour au calme, appropriation du projet, etc. Autant d’éléments invisibles utiles à la performance.»

Reste 6 ans pour préparer Paris 2024…

Dans quelques jours auront lieu les J.O. d’hiver de Pyeongchang et aucun préparateur mental ne fait partie de la délégation française. Seuls quelques athlètes (et de plus en plus d’ailleurs), dans une démarche exclusivement personnelle, se prépare mentalement à ces jeux. Pendant ce temps, la plupart des autres nations partiront non pas avec un, mais avec plusieurs préparateurs mentaux intégrés à leur délégation, aux staffs, et communiant avec les athlètes pour leur plus grand épanouissement.

Aussi, le contenu de ce rapport est une vraie nouveauté en terme d’affichage et de médiatisation sur l’aspect mental et un espoir de voir intégrer aux fédérations et à la délégation française dans les prochains mois/années des préparateurs mentaux au sein des staffs. Il va permettre à coup sûr de faire bouger les choses dans le bon sens et cela ne peut que ravir le préparateur mental que je suis, tout comme les préparateurs mentaux que nous formons chaque année, avec mes 13 collègues, au D.U. de « Préparation Mentale, Interventions et Aide à la Performance » de l’UFR STAPS Clermont-Auvergne.

D’ici 2024, il reste de notre responsabilité de continuer à travailler en réseau, d’avancer sur la reconnaissance des diplômes auprès du RNCP, et d’être vigilant à ce que le crédit et la confiance accordés à celles et ceux qui pratiquent aujourd’hui perdure. Une personne égarée, une mauvaise expérience et cette émulation pourrait retomber très rapidement, au grand dam de ceux qui croient profondément à l’importance du mental dans la performance.

Enfin, il me paraît important de rappeler que se préparer mentalement ne garantit pas un résultat. Ce n’est donc pas parce que la France intègrera de la PM chez ces futurs « médaillables » qu’ils en obtiendront forcément une en 2024. En revanche, ne pas s’y préparer, dans des compétitions dont les niveaux techniques, tactiques et physiques des athlètes est de plus en plus proche (imaginez donc dans 6 ans…), relèverait à mon sens d’une grossière erreur, alors que l’essentiel est désormais écrit et partagé, par tous et pour tous ! 🙂